Vous êtes vous déjà demandé comment font les caissiers ou caissières sourdes et/ou malentendantes, pour savoir si un article en caisse a bien été scanné ? Difficile avec cet handicap d’entendre le traditionnel « bip » qui fait grimper la note. Pour améliorer le confort de travail des hôtes(ses) sourd(e)s et malentendant(e)s, une enseigne de grande distribution a installé des caisses lumineuses. Une innovation qui permet aux concernés de ne plus se concentrer en permanence sur leur écran. Pour Vivre FM Benjamin Drouadaine est allé tester ces Lumicaisses. Reportage.

Les clients commencent à affluer dans le magasin Auchan de Bagnolet, en Seine-Saint-Denis, en cette matinée de semaine, et les employés sont déjà postés à leurs caisses. Parmi eux, Helder, 56 ans, prend tout de même un peu de temps pour discuter avec nous. Actif au sein de l'établissement depuis six ans, Helder est sourd-muet, un handicap qui n'a, semble-t-il, jamais était un frein pour lui. C'est toutefois après un parcours long qu'il a fini par décrocher le poste d'hôte de caisse qu'il occupe aujourd'hui. « Au départ je vivais au Portugal, explique t'il grâce à une traductrice en langue des signes, je travaillais un petit peu, mais c'était difficile sur le long terme parce que c'était la crise là-bas, et je ne voyais pas un avenir professionnel pour moi au pays.  J'avais une famille et des amis en France, alors je me suis dit que j'allais peut-être essayer d'aller là-bas et chercher un emploi ou une formation, voir un petit peu comment ça se passe. J'ai trouvé un centre de formation qui accueillait les personnes sourdes, je ne savais pas trop quoi travailler, quel métier je pouvais faire, et dans le cadre de la formation, on m' a proposé un métier d'hôte de caisse, donc je me suis dit "pourquoi pas". Au bout de six mois de formation en alternance, comme tout s'était globalement bien passé, mes employeurs ont alors proposé de me recruter en CDI ».

« Les entendants sont motivés »

Helder met toujours du cœur à s'investir à fond dans son travail, pour son plus grand plaisir et celui de ses supérieurs qui apprécient sa détermination. Dans l'objectif de développer ses compétences, il passe même une formation de secourisme, et une autre pour les gestes de prévention en cas d'attentat. Et bien qu'il ait encore besoin d'être accompagné régulièrement par un traducteur, il arrive désormais à converser un peu avec ses collègues, à qui il s'est proposé d'apporter un enseignement en langue des signes. « Je voyais que les personnes entendantes savaient me dire bonjour, essayaient de communiquer, mais ça restait très minime, bonjour, bonsoir, ça va, fait-il remarquer. J'ai eu envie d'enseigner la langue des signes à mes collègues, et la direction m'a dit "tu peux préparer ça ?", ils en ont donc parlé dans les hautes sphères et l'idée à été validée. J'ai pu enseigner la langue des signes auprès de mes collègues, et après la communication avec eux a été très agréable, on arrive à dire bonjour, à communiquer. Et je les vois après, quand je leur donne quelques petits signes, ils se retrouvent entre eux, ils parlent pas, et ils essaient de s'entraider entre eux pour signer, note-t-il avec une certaine satisfaction. C'est sympa, ils font l'effort, et les entendants sont motivés, ils ont vraiment envie d'apprendre la langue des signes ».

La lumière remplace le bip de la caisse

Si aujourd'hui le contact passe bien entre Helder et ses collègues, la surdité a tout de même pu lui causer certaines difficultés au travail. Principalement à cause d'un manque d'adaptabilité des outils qu'il utilisait. « Avant j'étais en caisse, et je ne pouvais pas ouvrir mon champ de vision, il était réduit puisque je devais me concentrer sur les lignes de mon écran. Parce qu'à chaque fois que je passais un produit, je devais voir si il était comptabilisé correctement, pas deux fois, pas trois fois, ou qui passe tous simplement. Pendant six ans ça a été ça, j'étais concentré uniquement sur mon écran ».

A force de rester fixé ainsi sur son écran, Helder finissait par souffrir régulièrement de maux de tête, une situation assez désagréable sur la durée. Mais cette époque est désormais révolue, grâce à un nouveau modèle de caisse dont les magasins de la firme sont équipés depuis maintenant quelques mois. On les appelle les lumicaisses, un nom très évocateur. Concrètement, lorsque l'on passe un produit devant le scanner, une barre lumineuse située en dessous de l'écran de la caisse, s'allume alors pour indiquer que le produit est bien enregistré, remplaçant ainsi le petit bip à qui ce rôle était dévolu, et que les personnes sourdes ne peuvent pas entendre. Une nouveauté qui marque un grand pas pour l'inclusion des travailleurs sourds dans le monde de la grande distribution, qui y sont de plus en plus présents. Rien que dans le magasin de Bagnolet, ils sont 9 en tout, et leur nombre pourrait augmenter ici et ailleurs, la direction du groupe s'étant donné pour objectif de favoriser l'embauche et l'inclusion de travailleurs en situation de handicap, quel qu'il soit.

Cette innovation développée par Auchan Retail France avec la société AMD-Câblage améliore considérablement le confort de travail des hôtes(ses) sourd(e)s et malentendant(e)s qui n'ont plus besoin de se concentrer en permanence sur leur écran. Ce système pourrait permettre également l'accès au métier de nouvelles  Pour faciliter la vie de ses collaborateurs sourds et malentendant, les Lumicaisses déployées par Auchan Retail France sur 40 premiers magasins dans toute la France.

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