Afrique

Vieillir avec le sida

14% des adultes infectés ont plus de 50 ans.
14% des adultes infectés ont plus de 50 ans.
Vieillir sur le continent africain est chose difficile pour tous, chaque année apporte son lot de maladies ; la plus sévère étant le sida. 14% des adultes infectés ont plus de 50 ans ; de nombreux systèmes de santé ne sont pas prêts à faire face à ce phénomène, indique le site Irin (département Informations humanitaires des Nations-Unies).

L es données disponibles sur le VIH chez les personnes âgées se limitent généralement au monde développé. Aussi sait-on très peu de choses sur les Africains qui vieillissent avec le VIH ; malgré la forte prévalence du virus sur ce continent. La revue médicale AIDS note - en fonction des estimations - qu' environ trois millions de personnes âgées de 50 ans et plus en Afrique subsaharienne seraient porteuses du VIH, soit 14 % de tous les adultes infectés.

Des avancées bloquées par des préjugés vivaces

Joel Negin, chercheur à l’école de santé publique de l’Université de Sydney et coauteur du supplément de la revue AIDS, explique cette carence de données par le fait que la plupart des études démographiques et sanitaires ne collectent pas d'informations sur les plus de 49 ans. Un oubli qu’il déclare inadmissible lors de la 19ème Conférence internationale sur le sida, qui s’est tenue à Washington le 25 juillet dernier.


« Nous devons commencer à parler (du fait que) le sexe ne s’arrête pas à 50 ans et combattre (nos) préjugés âgistes concernant le comportement sexuel », a souligné le scientifique. En 2005, les personnes âgées représentaient 15% des cas de VIH aux États-Unis. Le gouvernement sud-africain a inclus les hommes de plus de 50 ans dans la catégorie des populations les plus à risque depuis que la dernière enquête nationale sur la prévalence du VIH a révélé que plus de 8% des hommes et des femmes de 50 à 60 ans étaient infectés ; un taux plus élevé que chez les hommes de 20 à 24 ans.


«Lorsque vous vous rendez dans un centre médical, surtout en milieu rural... on vous considère comme une grand-mère.. » explique Dorothy Onyango, 55 ans. « Le personnel soignant se demande ce qui arrive à cette mamie, pourquoi elle se rend au centre médical pour une IST ou pour un préservatif, car, à cet âge, vous êtes supposée avoir arrêté d’avoir des relations sexuelles », remarque la directrice exécutive de Women Fighting AIDS in Kenya (WOFAK).

« Vieillir, ce n’est pas pour les lopettes »

Ignorés par les campagnes de sensibilisation au VIH, les aînés n’en savent souvent pas assez sur le virus et les manières de l’éviter ! Les personnes séropositives au VIH peuvent également être plus exposées au risque de contracter certaines maladies liées à la vieillesse. Différentes études montrent en effet qu’elles peuvent être touchées plus tôt par celles-ci. Or, dans les pays en développement, les systèmes de santé, qui doivent déjà supporter le poids du VIH/SIDA, ne sont pas équipés pour faire face à ce problème supplémentaire.


« Les études en la matière sont tellement récentes qu’il est difficile de savoir lesquels de ces problèmes sont liés aux effets secondaires des traitements», explique Laurie Garrett, agrégée de recherches sur la santé mondiale du groupe de réflexion Council on Foreign Relations. « Vieillir, ce n’est pas pour les lopettes », a-t-elle ajouté.

L’argent, barrière au traitement

Dans les pays développés, les inquiétudes concernant l’argent, la détérioration de l’état de santé et le sentiment d’isolement ou de solitude sont très répandues parmi les personnes âgées porteuses du VIH. Selon John Hock, un militant australien qui vit avec le VIH depuis plus de trente ans, les personnes diagnostiquées au début de l’épidémie peuvent avoir été obligées d’arrêter de travailler en raison de leur mauvais état de santé et nombreux sont ceux qui ont arrêté de prendre des dispositions pour leurs vieux jours, car ils ne s’attendaient pas à vivre aussi longtemps.


L’argent est un sujet encore plus préoccupant pour les personnes âgées porteuses du virus en Afrique. Ruth Wayeru, âgée de 65 ans, a été diagnostiquée séropositive au VIH lorsqu’elle en avait 48. Dans son pays, le Kenya, pour le traitement des malades, seuls les antirétrovirus (ARV) de première et seconde intention sont délivrés gratuitement. « Lorsque les ARV de seconde intention disent "non" à votre corps, il ne vous reste plus qu’à préparer votre enterrement », déplore Mme Wayeru aux participants à la conférence de Washington, car les traitements de troisième intention sont hors de prix et les retraités n’ont pas les moyens de se les procurer...