Cinéma

Entretien avec Matthieu Schaller : "une fierté personnelle de me dire que j'en suis capable"

Matthieu s'est confié au micro de Vivre FM sur son expérience dans La loi du marché
Matthieu s'est confié au micro de Vivre FM sur son expérience dans La loi du marché
Fortement remarqué, Matthieu Schaller, jeune cariste de 24 ans, joue le fils de Vincent Lindon dans le film La loi du marché. Infirme moteur cérebral, cela ne l'a pas empêché de passer devant la caméra. Il nous a accueilli sur son lieu de travail, à l'Etablissement et Services d'Aides par le Travail de Marne-la-Coquette pour évoquer son expérience.

Vivre FM : Vous avez toujours eu envie de faire du cinéma ?

Matthieu Schaller : C'est la première fois pour moi que je tourne dans un long métrage. J'avais déjà fait des courts-métrages avant, dans mon ancien établissement, avec ma professeur de français, et j'ai plutôt aimé ça. Du coup, oui, le cinéma est quelque chose qui m'a toujours plu.

VFM : Matthieu, vous êtes cariste, mais au vu du succès du film, voulez-vous vous consacrer désormais au cinéma ou continuer cette profession ?

M.S : Il faut savoir que le métier d'acteur est un métier compliqué, parce qu'il n'y a pas beaucoup de films qui parlent du handicap. Moi si j'étais amené à refaire des rôles, je ne veux pas que ce soit pour parler de handicap, plutôt pour jouer une personne en situation de handicap. Donc, oui, si j'ai la possibilité de refaire des films, je le ferai parce que ça m'a beaucoup plu. Après, on m'a aussi dit qu'il y a très peu de films où il y a des personnes handicapées, donc la réalité des choses fait qu'en attendant je continue mon métier de cariste, parce que c'est mon métier de base. Si jamais des réalisateurs ou des producteurs sont intéressés, pas forcément pour parler du handicap, mais qui ont besoin d'une personne handicapée, évidemment que je renouvellerai l'expérience.

Comment s'est passé le tournage ? Que fais Matthieu Schaller quand il arrive sur le plateau le matin ?

 

Généralement, je discute beaucoup avec l'équipe technique, elle m'a vraiment guidé durant le tournage. Après on me met le micro, le réalisateur Stéphane Brizé me dit comment faire et m'explique la scène. Après, il n'y a plus qu'à se préparer parce que derrière, il faut tourner.

Vous jouez le rôle du fils de Vincent Lindon dans le film. Comment vous avez-eu le rôle ?

Ils ont contacté tout simplement mon chef de service d'établissement, Frédéric Baert. Suite à ça, la directrice de casting est venue nous auditionner, moi et d'autres jeunes de mon âge ici, mais aussi dans d'autres établissements. Ils m'ont ensuite recontacté parce que mon profil les intéressait. J'ai  donc rencontré le réalisateur Stéphane Brizé.  J'ai réalisé un essai avec lui et puis ça s'est mis en place naturellement.

 Est-ce que passer devant la caméra, ça vous a fait peur au début ?

Comme je l'ai dit précédemment, j'ai déjà travaillé à l'école sur des courts-métrages, donc ça ne m'a pas du tout fait peur. Je me suis senti immédiatement à l'aise et mon handicap ne m'a pas spécialement gêné et franchement, j'ai aimé faire les prises, être sur le plateau. Je n'avais vraiment pas de stress parce que je connaissais déjà l'exercice de la caméra.

Arrivée de Matthieu au Festival de Cannes  

Racontez-nous votre passage au festival de Cannes

Ça a été une expérience formidable, franchement, c'est incroyable surtout pour une personne comme moi  qui est en situation de handicap, de me retrouver là où ont été les plus grandes stars, c'est quelque chose de magique. Un souvenir que je garderai à vie.

Vous en avez rencontré des stars ?

Malheureusement non, mais j'ai rencontré des professionnels, des réalisateurs, des producteurs qui m'ont parlé de mon rôle et m'ont dit que j'avais bien joué.

Qu'est-ce qu'a pensé votre famille du film et de votre prestation ? Et vos collègues ?

Ma famille est évidemment très fière, très contente, c'était formidable et une bonne expérience pour moi. Quant à mes collègues, tout se passe comme avant. Honnêtement, je n'ai pas eu l'impression d'un changement. On se connaît depuis quelques années parce que l'on travaille ensemble. Bien sûr ils étaient contents pour moi, ils m'ont félicité, mais ça ne va pas plus loin. Après on est collègues, pour certains amis, ça reste comme avant.

 Comment fait-on pour jouer un rôle, tenir un texte, quand on a un handicap comme le vôtre ?

La première chose qu'il faut savoir, c'est que le film a été entièrement tourné sous forme d'improvisation. En tant que personne en situation de handicap, j'avais vraiment envie de montrer aux personnes valides qu'une personne handicapée peut faire du cinéma, peut tourner un long-métrage. C'est aussi une fierté personnelle de me dire que j'en suis capable.

Dans le film, il y a une scène où vous racontez une blague. C'est vous qui avez eu l'idée de la blague ?

Non ce n'est pas moi, c'est la réalisateur Stéphane Brizé qui m'a demandé de sortir et m'avait conseillé quelques blagues, il m'a soumise celle-là et je l'ai faite dans la scène.

Vous avez également été l'un des rares acteurs à s'être fait laver par Vincent Lindon. Il fait ça bien ?

(Rires) Oui, ça a été une scène sympa à tourner, on a beaucoup communiqué avec Vincent pendant cette scène. Avec Vincent, on a pris le temps, on a beaucoup tourné cette scène, mais j'ai pris beaucoup de plaisir à la tourner.

Comment il est Vincent Lindon ? Il vous a donné des petits conseils sur le métier d'acteur ?

Oui, oui, on en a parlé, il m'a parlé de ses expériences mais pas tant que ça parce qu'on était vraiment concentré sur le film, on a surtout parlé du film.

Votre meilleur souvenir sur le tournage ?

Mon meilleur souvenir, ça a vraiment été de rencontrer des personnes formidables, il y avait vraiment un rapport humain avec l'équipe de tournage et je crois que c'est ce qui m'a le plus marqué.