Henri-Jacques Stiker, anthropologue

La perception que nous avons du handicap et la place que la société dans son ensemble se doit d’accorder aux personnes affectées de handicaps est une question qui suscite bien des débats. Mais qu’en disent les religions, qu’elles soient de tradition écrite ou orale ? Cet ouvrage se propose d’examiner les rapports que celles-ci entretiennent aux diverses formes d’infirmité : quelles représentations, quels discours se dégagent-ils des textes fondateurs, mais aussi des mythes et des différentes pratiques religieuses ?

Péché ? malédiction ? signe de Dieu ?

De la boiterie de Jacob au bégaiement de Moïse, de la folie de Saül aux corps problématiques de Muhammad ou Bouddha, en passant par les peurs ancestrales et le malaise souvent afférent, les représentations de l’infirmité, avec les traitements qui s’ensuivent, ne se comprennent que par le lien avec le type de divinités ou d’esprits dont les religions se dotent. Tout à tour péché, interdit, signe de malédiction, ou parfois encore, à l’opposé, symbole d’une cause élevée, l’infirmité revêt différentes significations relevant de la complexité et de la spécifité propre à chaque religion. Si le rapport au handicap d’une religion donnée n’est pas généralisable à la société dont elle émane, celui-ci, en revanche, est ici l’occasion d’examiner selon un biais inédit les grandes théories de la religion.

Henri-Jacques Stiker est directeur de recherches au Laboratoire histoire et civilisations des sociétés occidentales, à l'Université Denis-Diderot-Paris 7 et président de l’association Alter (Société internationale pour l’histoire des infirmités, déficiences, inadaptations, handicaps). Il est également éditeur en chef de la revue de recherche éponyme et membre du comité de rédaction de la revue Handicap, revue de sciences humaines et sociales. Il est docteur en philosophie du langage.

Contributions scientifiques

Henri-Jacques Stiker étudie les représentations de l'infirmité par le biais des récits et représentations. Il s'appuie sur la sémiotique, l'étude de textes et témoignages, contextualisée par des sources historiques et sociologiques. Il s'appuie notamment sur l'histoire des idées de Michel Foucault.

Son ouvrage le plus cité est "Corps infirmes et sociétés", qui propose une réflexion philosophique sur les différentes définitions et perceptions du handicap à travers l'histoire. Ce livre est structuré en cinq grandes parties, progressant historiquement. La première présente les handicaps dans la Bible. La seconde s'intéresse aux handicaps à l'Antiquité : ils sont alors perçus comme une punition des dieux. La troisième partie se penche sur les sociétés médiévales, et à l'importance croissante de l'église dans l'organisation de la pauvreté et la charité. La quatrième partie porte sur la époque classique, et s'appuie notamment de Lettre sur les aveugles à l'usage de ceux qui voient de Diderot, marquant un tournant vers l'éducabilité. Le dernier chapitre s'intéresse à la réadaptation, depuis la fin du XIXe siècle. La plus récente version de ce livre inclue deux nouveaux chapitres, l'un faisant le point sur les différentes théories du handicap (théorie de la stigmatisation, disability studies, théorie culturaliste et théorie de la liminalité ), le second proposant une analyse psychanalytique de l'exclusion des personnes en situation de handicap.